1. |
J'écris
04:26
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J'ÉCRIS
J’écris depuis la gare, depuis le train
depuis la vue imprenable sur l’autoroute
J’écris avec ma faille avec mon sang
depuis mes entrailles et l’apnée de mon âme
J’écris pour faire naître la rage
J’écris depuis mes larmes de crocodiles
et mes sourires à faire tomber une armée entière
j’écris comme un exil à faire, à défaire, à refaire
j’écris pour mes amies et pour mon père
J’écris pour les femmes de ma vie
femmes courage et solitaire
celles qui ploient ou celles qui plient
celles qui font face, qui gueulent trop fort
qui savent mieux mordre que d’embrasser
j’écris pour les vivants et pour les morts.
J’écris sur du papier, dans un camion,
dans un café, dans un calepin, au dos d’un ticket
j’écris pour ne pas avaler ma langue
pour ne pas me casser le voix
j’écris pour ne pas crier trop fort
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2. |
Porte-vélo
05:12
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PORTE-VÉLO
La porte est fermée comme dans une prison
il tourne vers la porte, des heures qu'il attend
le bon moment, pour s’évader...
il a planqué ses affaires pour pas qu'on lui vole
son rasoir surtout ils ont dit ici
rasoirs interdits et les ciseaux aussi
il regarde par la fenêtre à travers les volets
c’est un temps parfait pour faire du vélo
chemise grand’ouverte et le vent dans l’dos
il ferme les yeux... il se revoit...
à bord de son bolide des mollets en béton
au rythme de la chaîne qui glisse sur les pignons
il claquait chaque course en mettant du braquet
il mordait dans l'guidon pour gravir l'horizon
c'est lui l’roi du bitume sous toutes les latitudes
des socquettes en titane le coup d'pédale soyeux
et quand vient une côte pas quitter l'col des yeux
debout sur les pédales il devient danseuse...
Il veut sortir d’ici, il veut pas rester là
il va d’mander au taxi de l’emmener loin de là
lui et son rasoir, lui et ses ciseaux, mais
il paraît qu’il déjante, il paraît qu'il déraille
qu’il a un pet au casque, un petit vélo dans la tête
mais pourquoi la porte elle est jamais ouverte ? Ouvrez-lui la porte !
Il veut sortir d’ici, il veut pas rester là
il regarde par la fenêtre, à travers les volets
le voilà qui guette, le bon moment
pour s’évader... et enfiler...
son cuissard en lycra, ses bretelles ajourées
ses gants en coussinets, ses crampons ses cale-pieds
son casque et ses lunettes, son compteur tour de pédale
en amont en aval, avaler les kilomètres
ne jamais poser l'pied, avant d'être au sommet
faire rougir les onze dents, se mettre en bec de selle
le roi des sept collines, sa colle et mes rustines
le roi d'la mécanique, le pro des pneumatiques...
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3. |
T'es fou
06:41
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T'ES FOU
Tu as failli mourir, tu aurais dû mourir,
tu aurais pu mourir, mourir complètement, y rester pour de bon
ton souvenir se serait constitué en entier
on aurait dit de toi que tu étais gentil, travailleur, honnête et rigolard,
toute l'entreprise se serait cotisée, ta femme t'aurait regretté, tout le monde aurait pleuré
tu as failli mourir
mais t'es pas mort
t'es pas mort en entier
t'es ressuscité mais
t'es ressuscité à moitié
tu es un mort vivant
T'es fou, t'es le fou de ma vie
une averse, une mousson perpétuelle
et tout le temps je t'aime
Tu es un rescapé, un écorché vif
revenu à la vie, remballé par la mort
tu es un zombie
un fantôme
un épouvantail
un spectre
un trou noir
un trou béant qui aspire tout autour de lui
tu es un aspirateur
mais un aspirateur ça sert à quelque chose et toi
tu ne sers à rien
T'es fou, t'es le fou de ma vie
une averse, une mousson perpétuelle
et tout le temps je t'aime
Tu fais partie des gentils mais pas bancables
des inutiles, des insatisfaits
des assistés des bancales
de ceux qui trouent le budget de la sécu
de ceux qui sont en trop, qu'on voudrait loin, ailleurs
de ceux dont on a honte
mais c'est normal puisque
T'es fou, t'es le fou de ma vie
tes larmes noient ma gorge
je bois la tasse à tes côtés
et tout le temps je t'aime...
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4. |
L'ultime baiser
05:19
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L'ULTIME BAISER
Dans un palace grand ouvert
à la lumière d'un sabre blanc
dans le tremblement des mouettes
et le cœur à marée basse
Dans une mer sans écume
à la lueur d'un phare de pierre
dans tes bras qui se consument
et le silence qui se fracasse
Viens danser des heures sur la terre craquelée
prendre sur ses lèvres l’ultime baiser
Dans un roman lignes de failles
et le ciel rageant d'étoiles
dans un matin à crever l'âme
dans un vacarme sans parachute
Dans la main d'un géant de pierre
et les brindilles qui s'acharnent
dans les gerçures d'une rose muette
et les lianes de ses cheveux
Viens danser des heures sur la terre craquelée
prendre sur ses lèvres l’ultime baiser
Dans l'éternel crépuscule
et ce parfum qui nous désarme
dans l’aurore qui se bouscule
à la porte du nerf vagal.
Que la nuit se couvre d'étoiles
qu'une météorite s'écrase
qu'enfin ses larmes regagnent la mer
que les ténèbres deviennent pétales
Viens danser des heures sur la terre craquelée
prendre sur ses lèvres l’ultime baiser
toi qu'on oublie toi que l’on prie
toi que l'on fuit et que l’on suit
toi qu'on murmure toi que l’on crie
qu'on délaisse toi que l’on chasse
toi qu'on attend, toi que l'on prie
qu'on adore ou qu'on maudit
Viens danser des heures sur la terre craquelée
prendre sur ses lèvres l’ultime baiser.
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5. |
À partir de maintenant
06:24
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À PARTIR DE MAINTENANT
Alprazolamdepakotéziprexaeffexorquiétapinexanaxettamsulosine
À partir de maintenant tout a changé
tout est nouveau et tout est blanc
alors je change de rimes, je change de peau
j’inverse les mots, je te dédie ce chant
À partir de maintenant je vais manger tant de fraises
que je vais devenir cerf-volant
je vais grimper tout au sommet pour repeindre
mes lèvres et mes cheveux en blancs
À partir de maintenant je prends la route
je roule jusqu’à l’aurore, jusqu’à prendre la mer
je dors dans des plumes d’or, je m’éveille en plein jour
je vais chanter encore, je vais chanter plus fort
Et je danse sous l’orage juste pour te faire rire
je mords dans l’orange de dieux inventés
je vais faire de ta peine un collier qui enchaîne
les perles de mes cris aux perles de tes silences
Alprazolamdepakotéziprexaeffexorquiétapinexanaxettamsulosine
À partir de maintenant c’est comme le premier pas
parfois ça tangue un peu mais mes soleils sont là
ils me soufflent des rêves alors j’inspire plus fort
je fonds dans leurs bras, je me gave de chocolat
À partir de maintenant je vais écrire un musique
qui fera danser ton âme en valse æternam
toi, tu seras celui qui dirige l’orchestre
armé d’un tromblion ou bien d’une simple caisse
À partir de ce jour tout est si différent
il n’y a pas de passé il n’y a que des toujours
et si parfois des perles cognent à mes paupières
c’est que je pleure d’amour, c’est que je pleure d’amour
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6. |
Nocturne
01:31
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7. |
Sur le parvis
05:20
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LE PARVIS
Sur le parvis toute une foule
qui se regarde, se dévisage
chacun savait qu'un jour viendrait
jour du défunt oui mais voilà...
Ils portent tous le même nom
mais aucun d'eux ne se connaît
Suit le cortège funèbre et triste
où chacun pleure celui qui meurt
bon, ça dure un temps, ça dure un temps.
Quand le cercueil est bien en terre
on lève la tête on s'interroge
Qui donc est-elle et celui-ci
est-il son frère, est-elle sa fille ?
Même silhouette mêmes ancêtres
mais trente années sans se connaître
Toute une famille qui se rencontre
ça pique les yeux à regarder,
ça pique les yeux à regarder.
Ils s'excusent de ne pas se connaître
ils arrêtent de se dire vous
ils se disent tu, ils se disent tout
Ils se racontent et trente années
ça prend du temps à raconter
Même silhouette même nez
mais trente années à rattraper
Leurs rires ont fait éclore des fleurs
les pleurs ont arrosé la cime
Moi j’étais là et j’ai tout vu
j’vous dis qu’en une seule journée
un arbre entier
s’mit à pousser...
Chaque matin je le regarde
il est immense et son feuillage
c'est étrange à la même couleur
que mes yeux
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8. |
Requiem
06:06
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REQUIEM
4 h du matin. Paris.
Le soleil va bientôt se lever.
Le bus roule. À son bord, toutes les cellules de nos corps.
Arc de triomphe !
C'est le jour du succès, de la réussite
C'est le jour de la suite.
Six mois !
C’est comme si on avait six mois, et on rentre à la maison
on peut retourner chez nous
puisque maintenant tout est là
On s’est rempli le patronyme
on trouvé et déchiffré racines
les poussières d’amour sont maintenant devenues des rocs
une falaise
une terre entière.
Alors la liberté ?
On va la manger, on va se la tartiner
Le bonheur ?
On va se l’engloutir !
À la tienne
Vous êtes dans les plumes qui tournent dans le ciel
qui tombent sur la foule comme une pluie de soleils
vous êtes dans l’argile qui habille d’argent
les corps agiles dansant dans le torrent
Vous êtes dans les boucles et les rires des enfants
leurs mèches insouciantes leurs désirs incandescents
vous êtes dans le pourpre qui colore leurs lèvres
quand leurs veines palpitent debout face à leurs rêves
Vous êtes dans les délices et les festins sans fin
les hors-d’œuvre hors de prix, les desserts resservis
vous êtes dans le vin, le champagne alsacien
et la piquette brute qui sert de coupe-faim
Vous êtes dans les regards des reines d’Hérens
quand elles livrent combat à la pigne d’Arolla
vous êtes dans le glacier au Tsaté, au Remointse
dans le lac gelé, vous êtes mon requiem
Met gouloulich belli marakoumch mEya
rakoum hadthrin fi kouloum ken
Vous êtes sur la lune, dans le port, sur les grues
dans l’abeille bourbon et les tonnerres de Brest
vous êtes dans les hangars, les fourneaux, la criée
les bourrasques enragées et le grain qu'il nous reste
Vous êtes dans les détours par le Boulou par Rivesaltes
dans tous les kilomètres qui enrobent nos pas
vous êtes dans les bougies fragiles cathédrales
le feu, la paille et les larmes de joie
Vous êtes les folies qui soudain se soulèvent
qui grondent et qui tempêtent qui s’épuisent et s’achèvent
vous êtes les insomnies, les espoirs infidèles
les ambitions idiotes, la quête, la trêve
les éclats, les fou-rires qui tanguent et qui chavirent
les drames insolents les faiblesses indociles
vous êtes le métronome, le tempo éternel
le chant dans les ruelles, c’est vous le requiem
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9. |
Poudrière
06:30
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POUDRIÈRE
Toi mon profond toi mon subtil, mon demain mon hier
mon opposé mon invincible, toi mon arbre ma poudrière.
Tu es mon double mon invisible, ma prison ma liberté
je suis l'averse et toi la brise, diamants cailloux entremêlés.
Tu es ma grotte et mon nichoir, suis-je ta cage et ton perchoir
dans tes bras de vagabond, j'ai comme trouvé une maison.
Nous avons connu des tempêtes
des deuils et des naufrages
mais chaque matin m’émerveille
puisque s'y trouve ton visage
Quand tu soulèves mes deux ailes en frôlements soupirs intimes
c'est tout mon corps qui se soulève et si je deviens ta victime
que je te laisse parcourir chaque étincelle de peau brûlante
si je savoure si je soupire sous tes caresses impatientes
c'est pour qu'à mon tour je dévore en d'exquises bouchées impolies
les contours de ton corps, oui je t'adore à l'infini.
Nous avons connu des tempêtes
des deuils et des naufrages
Mais chaque matin est une fête
quand j'y retrouve ton visage
Parfois on se connaît trop bien, je t'ennuie tu me chamailles
nos yeux naviguent vers le lointain, vers d'autres rives d'autres pagailles
et puis soudain nous revoilà, face à face et hésitants
je savoure ta nouvelle peau et toi tu ris comme un enfant
et dans tes bras oui je retombe, moi la gourmande moi l'insatiable
à mon souffle tu succombes, toi le mi-tendre mi-indomptable
Notre amour est une friche où pousse une prose sauvage
on y trouve des rimes riches et des refrains de carnaval
moi Pénélope et toi Ulysse et tout à coup c'est tout l'inverse
moi qui galope et toi qui tisses des poèmes de princesse
mon invincible, mon opposé, sais-tu comme j'aime les matins
quand tu brandis tel un trophée l’œuf à la coque cuit à point
Nous avons connu des tempêtes
des deuils et des naufrages
mais chaque matin m'émerveille
pourvu que s'y trouve ton visage
si l'on traverse d'autres tempêtes
d'autres naufrages eh bien je souhaite
que chaque matin fasse renaître
nos amours plus fortes et plus sauvages
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Murielle Holtz Lasalle, France
Murielle Holtz est autrice, compositrice et interprète.
Elle remporte en 2017 le Tremplin des Nuits du chat avec sa
symphonie en solo "Soliphonies". Elle sort l’année suivante un premier EP, SOULITUDE.
Elle est élue Lauréate des «Before 2019». En novembre 2020 elle sort son premier roman «Festin pour un fou». À l'automne 2021 elle sort "RHAPSODIE EN TRIDEM », neuf poèmes cousus d'or et de groove.
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